LES MULTIPLES FACETTES DE LA FONCTION D'EXPERT

Séance animée par : Jean-Louis MARTINAND

  • 10h15 - 12h 00
    Jeanne ETIEMBLE, Directeur de recherche à l'INSERM, Directrice du centre d'expertise collective de l'INSERM

« L'expert : un scientifique en situation d'expertise »

La demande croissante par les pouvoirs publics d’expertises dans le domaine scientifique traduit une évolution des liens entre science et société. L’activité d’expertise est par nature différente de l’activité de recherche. Néanmoins, on peut considérer que l’une s’appuie sur l’autre. Les situations et les enjeux d’expertise peuvent être différents selon les secteurs scientifiques (sciences du vivant, de la nature, de la matière, de la société). L’expertise « collective » de connaissances apparaît différente de l’expertise « individuelle » technique. La question du statut et de la fonction de l’expert se pose donc différemment selon les situations d’expertise. Comment s’effectue le choix de l’expert ? Comment est organisée sa contribution pour une expertise ? Quelles sont ses responsabilités et celles de l’Institution qui le sollicite ? Quels sont les différents aspects de sa mission ? Quelle est la valorisation d’une telle activité ? Autant de questions qui concernent les multiples facettes de la fonction d'expert.

La conférence

 

La présentation Powerpoint : J.Etiemble

 

Le débat

 

Jean-Yves TREPOS, Professeur de sociologie à l'Université Paul Verlaine - Metz,
Directeur du Laboratoire Lorrain de Sciences Sociales, Universités de Metz et Nancy 2

« Les experts face aux savoirs profanes »

L'appui des savoirs scientifiques au travail d'expert est longtemps resté à l'abri d'une critique de l'expertise qui était plutôt dirigée contre l'instrumentation politique ou technocratique de cette activité. Après ce rappel, l'exposé essaiera de faire le point sur les enjeux de cette critique aujourd'hui. Très schématiquement, elle s'inscrit dans un jeu à trois dimensions. La première définit une contre-expertise se faisant jour au nom d'une critique de la neutralité de la rationalité scientifique (voir le cas des OGM) et du monopole savant de la définition des risques. La deuxième se présente comme une alternative à l'expertise scientifique au nom d'une expertise citoyenne ("nous sommes les experts de nos vies", entend-on parfois) et peut prendre appui sur la diffusion des NTIC (en particulier téléphonie mobile, appareils numériques) pour permettre à chacun d'être en prise sur l'événement. La troisième est moins visible, mais sans doute plus inscrite dans le fonctionnement économique contemporain : partant de la distinction de Lisbonne (2000) entre "information" (duplicable) et "connaissance" (résultat d'apprentissages et non duplicable), l'économie de la connaissance ouvre le chantier d'une implémentation collaborative des savoirs (notamment sous la modalité du "wiki"), elle aussi en porte-à-faux par rapport à la conception scientifique usuelle de l'avancée du savoir. Ces trois critiques ne sont pas sans parenté. L'exposé cherchera à évaluer les défis qu'elles portent.

La conférence

 

La présentation Powerpoint : Jean-Yves Trepos

 

Le débat

 

  • 13h30 – 14h15

Bernard DECOMPS , Membre de l'Académie des technologies, ancien Directeur de la Recherche au Ministère de l'éducation nationale

« La " longue marche " d'un chercheur vers l'expertise... et vice versa »

Pourquoi observons-nous tant de distance entre l’expert et le chercheur ? Est-ce l’apanage de certaines sciences, une façon de se consoler du peu d’intérêt de la société pour les savoirs qu’elles véhiculent ? Pour les physiciens, en particulier, n’est-ce pas la hantise d’une confrontation avec les spectres de Hiroshima ou de Tchernobil ? En prenant appui sur son itinéraire personnel, puis sur le parcours de quelques-uns de ses proches, en France et plus souvent, à l’étranger, l’auteur explore les obstacles que rencontrent des chercheurs sans complexe pour remplir une fonction essentielle à la société, celle d’expert à son service. Les obstacles, certes, mais aussi les gratifications de cet autre « métier » et les pièges toujours présents d’un improbable retour en arrière.

Improbable retour à la Science avec un grand S, pas si certain ! Après des années consacrées à la création et à la montée en puissance d’une entreprise ou de tout autre entité dont la finalité éloigne de la science en création, le chercheur devenu expert à temps plein n’est plus le même, sans pour autant avoir perdu une once de sa capacité d’imagination. La maïeutique des questions posées à l’expert qui vit en lui et des nouvelles réponses de la science dont il comprend la signification fonctionne. Elle lui permet ainsi d’explorer des champs nouveaux, susceptibles de profiter aux deux parties. La « science pratique » que l’auteur a mise en forme à Cachan n’a nullement renoncé à l’excellence. Plus proches encore, les Instituts Carnot et les pôles de compétitivité, du moins certains d’entre eux, possèdent cette vertu de démontrer que, même en France, science et conscience sociétale ne sont plus nécessairement ruine de l’âme du chercheur.

La conférence

 

 

 

Le débat